Dimanche soir, enfin lundi à trois heures du matin, je suis tirée de mon lit par mon chien malade, il faut sortir, deux vêtements des chaussures pas de coiffage, il faut sortir.
Bon.
Nouf sur le trottoir, il s’éloigne de pneu en pneu, moi moitié dedans moitié dehors, tenant la porte de l’immeuble, moitié éveillée moitié roupillant.
Bon.
Deux types ivres remontent la rue, c’est toujours à cette heure-là que les types ivres remontent. A toutes les autres heures de la nuit, les populations de Blanche-Pigalle ne se mélangent pas à celles de Montmartre-Abbesses. En bas les boites, en haut les restaus, pas le même public, pas de mélange.
A part pour les touristes, qui ne savent pas, qui confondent, mais à cette heure-ci ils sont au lit.
Les restaus sont fermés, ma rue est vide à part ces deux types ivres qui montent.
Bon, ils passent.
Je ne sais plus où est mon chien.
Tiens, deux autres. Ouhla ils ont l’air atteints, heureusement qu’ils sont deux pour se tenir mutuellement. Ah des écossais, en kilt, mais qu’est-ce qu’ils font là ? Ils ont loupé le ferry ?
Hum beurk ils sont raides torchés, ah c’est le bouquet il y en a un qui se pisse dessus, je n’ai jamais supporté la vision des gens bourrés, l’avilissement de soi en toute conscience et par choix me dépasse complètement. Je comprends mieux les gens drogués que les gens saouls, et leur vue m’est moins pénible. Bref.
Un grand type arrive au distributeur de billets en face, me jette un coup d’œil au passage.
Il est où, ce chien ?
Je surveille vaguement le type au distributeur, zut il se retourne. Bon, continue son opération.
Je ne regarde pas, enfin je surveille du coin de l’œil, merde il se retourne à nouveau et nos yeux se croisent. Il m’a regardée trois fois, il est foutu de croire des conneries, ce con. Je ne suis pas celle que vous croyez...
Je tiens toujours ma porte, et le chien n’arrive pas.
Qu’est-ce que je fais ?
Je commence à flipper un peu.
Bon. Je vais rentrer et fermer, de toutes façons le chien restera derrière la porte s’il la trouve fermée.
Je suis dans l’entrée, pas très rassurée.
La lumière s’éteint.
Un rai de lumière sous la porte.
Pétard il est là, il secoue la porte, et essaie d’entrer.
Je suis juste derrière. Je ne l’ai pas entendu venir.
Il trifouille le code, bip bip bip. Secoue à nouveau.
Je prie, j’ai peur, je ne bouge pas. Je ne fais pas un bruit.
Bip bip à nouveau, il essaie encore le code. Mon cerveau est dégagé de tout, les neurones ont le champ libre et tournent à plein régime. Tant et si fort que je vis au ralenti.
Il secoue la porte encore puis plus de bruit.
Plus de bruit. Est-il encore là ? Parti ? Je ne l’avais pas entendu venir.
Est-il là ?
Une minute passe. C’est long, une minute.
Deux.
Des ombres passent derrière la porte, bougent, repassent . Deux pieds ? Quatre pattes ? Je ne sais pas.
En une seconde c’est décidé. J'appelle Nouf, aucune réaction, j’ouvre la porte. Ouf c’est le chien. Il entre, je ferme, je monte, je rentre avec lui.
Il y a une part de jouissance dans cette peur de lionne, cette peur de l’urgence, celle qui dégage l’esprit, libère les sens, le raisonnement, le courage. Prépare à l'action.
J’aimerais apprendre à switcher pour cette peur-là quand me noue la peur pentue, insidieuse et crochue des avant-rendez-vous, des mécontentements de soi, des dead-lines trop proches. La peur stérile que je déteste tant.
Qelle horreur j'attendais la fin avec impatience! Ouf
Rédigé par : Fabienous | mardi 09 oct 2007 à 00:01
Moi, ma meilleure amis, son chien s'appelle Nouk.
C'est dingue, non ?
Rédigé par : spicynico | mardi 09 oct 2007 à 14:14
Dingue.
Moi, ce que j'aime, ce sont les phrases avec tout un dégradé de sujets, comme la tienne. J'adore. Moi, mon frère, son scooter, son top-case, eh ben son verrou ils l'ont fracturé.
Rédigé par : hoplalavoila | dimanche 14 oct 2007 à 16:01
Ils l'ont fracturé hors taxes j'espère !
(désolé)
Rédigé par : spicynico | mardi 16 oct 2007 à 14:26