Ah oui, moi c’est pareil avec mes amis. La plupart.
Non, je ne les mange pas, eux non plus il faudrait avoir grand faim. Et ils n’ont pas non plus de petite queue ridicule à l’arrière avec des oreilles ridicules aussi et ils ne font pas de provisions dans leurs joues, ou pas tous.
Non vous ne me suivez pas, je le crains. Pourtant c’est intéressant, je parle de mes amis.
C‘est parce qu’on m’a expliqué, et je me dis que c’est peut-être ce qui s’est passé ici, on m’a expliqué qu’en général les propriétaires de serpents leur donnaient à manger des souris congelées. Donc, par le fait, mortes. Ici ça ne semble pas tellement être le cas, il ressemble moyennement à Hibernatus le petit bestiau gris. D’un joli gris, d’ailleurs. Mais comme parfois on fait les trucs un peu vite, on bâcle un peu, parce qu’il faut bien et qu’on aimerait bien pouvoir tout peaufiner mais la vie est ainsi faite, je me dis que peut-être ici, le petit bestiau a été donné vivant pour aller plus vite, ou parce que la machette était au sale, que sais-je. Mais d’habitude on les donnerait, donc, congelés parce, m’a-t-on dit, si le serpent n’a pas faim tout de suite, il laisse sur le bord de son assiette, comme le gras du bifteck. Et si la souris, vivante, laissée là, se met à vadrouiller dans la cage, si elle y fait sa vie pendant 24 h, eh bien figurez-vous que le serpent ne la mangera plus jamais. Elle est devenue sa copine, une histoire de reconnaissance de territoire assez subtile et sur laquelle je ne m’étendrai pas parce que j’en ignore tout. Mais en tout cas, ce n’est plus son déjeuner, c’est sa copine.
- Hop hop hop, ça fait 24 h là, il y a des délais légaux mon coco
- Ouh pardon, je désole, au temps pour moi ptit gars
- Ben oui mais faut faire attention, ya des procédures quand même
- Ah mais t’es mon copain, pas de souci, bienvenue
- Tu sens un peu fort. Non ? Ou c’est moi.
Et là, vous me voyez venir avec mes amis. Ah.
J’ai appris aussi, à ce propos, que certains animaux avaient des doudous. Mon chien Nouf, par exemple.
Mais même les chevaux de course, il paraît que ceux qui sont sensibles et impressionnables, ou un peu angoissés, avec toute cette pression, eh bien on met dans leur box un mouton, ou un lapin, et ça devient leur doudou. On trimballe le mouton ou le lapin dans le van de course en course, de Pau à Chantilly, et ça bêle à Auteuil.
Après chaque course, le cheval est tout rasséréné de retrouver son copain à lui, même s’il a perdu et que son propriétaire est ruiné à cause de lui. C’est incroyable, non ? On m’a dit ça, je trouve ça extrêmement touchant. Mais bon, je ne suis pas une pro des canassons et même j’en ai un peu peur.
Parce que, avec pas mal de mes amis, ça ne s’est pas hyper bien passé au début. Pourtant je suis une crème. Donc je ne comprends pas.
Mais en tout cas, souvent des gens avec qui je me fritais un peu au début (malgré ma crèmitude, donc) (crèmerie ?) (crémation ?) sont devenus des très proches, des préférés, des essentiels.
Sans doute parce que ce que je préfère chez les gens, c’est la sous-couche. Le fond.
J’ai vérifié dans le dictionnaire pour trimballe, et il y a bien deux L, ce qui me réjouit. Mais c’est d’autant plus injuste pour balade, je trouve, qui est d’une mesquinerie proche de la fainéantise, on ne va pas loin avec un seul L.
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